J'ai tellement été élevée avec le désir de bien faire pour ne pas décevoir que j'ai en communauté un tempérament très "bonne élève".

Je respecte les règles des autres avec joie et bonne humeur, ce qui me vaut quand j'en ai besoin quelques faveurs, sans non plus que ces dernières aient été un objectif à atteindre.

En même temps je me dis que j'aurais mieux fait un peu d'éclater les règles. J'ai peur de me lâcher, je crois.

En musique je ne sais que mal déchiffrer les notes, imaginer chanter à la tierce me tétanise (et si c'était faux ?).

J'ai dansé comme de nombreuses petites filles en comptant (dans ma tête) 1,2,3,4, et 5,6,7,8, mais je fais tapisserie ou je garde le sac de ma copines quand il y a des occasions où on danse en société. Parce que bon, le ridicule ne tue pas, mais il rend ridicule, et si je ne peux pas être bonne dans ce que je fais, je ne fais pas.

J'écris ces billets courts, les uns après les autres, mais s'il me vient l'idée d'une histoire plus longue, je bloque, parce que forcément, ça ne sera pas aussi bien que tous ces romans fabuleux dont je me suis nourrie. (Ironiquement, papa me dit à propos de l'écriture : "il faut peut-être se tromper beaucoup avant d'y arriver ?" alors que c'est de lui que je tiens ce désir de faire mieux que bien !).

Peut-être qu'il faut que j'apprenne à lâcher prise, à ne pas forcément faire très bien du premier coup ? Que j'apprenne aussi le plaisir de participer ?

En attendant je savoure dès que je peux les approbations diverses, les mots gentils, les bras qui s'ouvrent (que j'aime les bras amis et aimés qui s'ouvrent et se referment sur moi, indispensable à la vie, ça). L'autre jour j'ai reçu professionnellement ce compliment inattendu : un de mes clients m'a dit "tu es incomparable, c'est merveilleux de te connaître". Certes c'est un client chouchou, certes j'ai la chance d'avoir ce boulot qui tisse du lien humain et qui fait qu'on se dit des choses sympathiques, souvent (d'ailleurs, il faudra que je vous dise, depuis qu'il n'y a plus Face de Cul, à part le salaire, j'ai un job de rêve, c'est fantastique).

Bref ces mots inattendus dans ce contexte, je les ai savourés. J'ai remercié poliment, retourné le compliment sincèrement, et apprécié. Je crois que c'est un premier pas du lâcher prise. Avant je me serais défendue, j'aurais rétorqué que c'était bien le moins, tout ça. Mais ça c'était avant (avant quoi ?).

Premier pas, quand cessons-nous de faire des premiers pas ? Ceux de l'enfance, puis ceux vers des états de nous qui nous conviennent mieux, ceux vers les autres.

Et en même temps ils ont la saveur de victoires sans prix, ces premiers pas.