Le premier homme vraiment important dans ma vie (hors de ceux qui me sont liés par la famille et mon pôpa en particulier), il m'a montré de moi quelque chose qui m'est encore essentiel.

La différence que je fais entre l'état amoureux, qui papillonne, qui nous fait fixer le téléphone d'un air béat et nous rend con comme des manches mais gais comme des pinsons. Et qui se nourrit autant de ce qu'on voit de l'autre (tout bien ! tout beau ! tout joli !) que de ce que l'autre nous renvoie de nous (tout bien ! tout beau ! tout joli !).

Et l'état d'amour qui ne mérite pas le nom d'état puisque, pour moi, une fois qu'on aime quelqu'un, on l'aime toujours, no matter what. Ce qui fait qu'on est profondément attaché à une personne, en dépit de tout, pour le meilleur et pour le pire.

Le premier "nécessite" une histoire d'amour, le second peut être fait d'histoires jamais vécues, ou un peu inabouties...

Etre amoureux(se), ça peut devenir "aimer", un jour. C'est pas obligé. Ce n'est pas toujours une fin en soi. Ca peut aussi s'arrêter et nous faire nous retourner en nous demandant ce qu'on pouvait bien lui trouver, à l'autre.

Aimer, c'est garder toute sa vie cette empreinte. Même si on ne se voit plus, qu'on se fâche, qu'on est loin, que l'autre est mort. C'est pour toujours avoir cette petite parcelle de soi qu'on a donnée à l'autre, et inversement.

Dans ma tête, en tout cas.

Ce premier des points cardinaux, appelons-le "Nord", vu que c'est par là qu'il vit (non, plus loin que chez les Chtis ! Dans un pays à langue improbable !), il m'a aussi donné son parfum que je porte toujours, une dose encore supplémentaire d'affinité pour l'humour dit "anglais", une aversion définitive pour le Long Island Ice Tea, la découverte de Copenhague et de quelques éléments de cuisine danoise, des souvenirs de rires et de discussions sans fin, une réputation de dangereuse terroriste qui voyage avec du reblochon.

Et des morceaux l'un de l'autre qu'on s'est échangés il y a plus de quinze ans et qu'on regarde avec tendresse encore aujourd'hui. Il n'y a plus que nous pour nous en souvenir. Tous les deux trois ans, quand il passe par là et qu'on va manger ensemble en commentant le système syndical danois.

Non, nous n'avons jamais été un couple. Mais oui, de l'amour, il y en a. Même si aujourd'hui c'est une forme d'amour dénuée de toute dimension sexuée.

(L'une des chansons phares de notre play-list)