Mercredi matin, je suis partie en repérage dans le lieu où nous accueillerons nos invités mardi.

Il s'agit d'un haut lieu du militantisme, d'un lieu historique.

Et qui dit historique, dit dinosaure (oui, j'ai des raccourcis violents si je veux).

En visitant la salle, la camarade en charge de la logistique me montre le passage des invités.

Et ce faisant, nous apercevons, au fond d'un bureau enfumé, murs tapissés d'étagères et de bouquins, le camarade JP.

Présentations.

JP n'a pas d'âge mais au moins soixante ans. Il est sec, n'a plus de voix (il semble entretenir son précédent cancer de la gorge en fumant des cigarillos dans son bureau, ce qui explique l'enfumage). Il sent l'alcool à 9 heures du mat.

Et de l'échange de nos noms (bienvenue, camarade !) et quelques informations, j'apprends qu'il est l'historien officiel du lieu. Alors il me montre quelques réalisations, rouscaille sur les gens qui ont racheté une partie de la bâtisse (et qui ont mis un incompétent à sa tête), mais me dit que, malgré tout, quand ils ont besoin de savoir un truc, c'est à lui qu'il demande.

Il porte une casquette kaki à la Castro. Un pins dessus avec un marteau et une faucille.

Il me parle des salariés d'aujourd'hui qui n'ont plus d'autre choix que se soumettre, ou devenir des exclus de la société.

De son gamin qui ne croit pas à la mort du barbu tant qu'il n'aura pas vu la photo. Que lui, il en a vu, des photos du Che, fleurir sur les murs des camarades. Qu'il ne faut pas confondre révolutionnaire et terroriste.

Des caissières à bac + 5 qui sont les victimes muettes de nos société marchande.

Et ben vous savez quoi ? Il est attachant, le camarade JP. Toute la journée comme voisin de bureau, peut-être pas, mais... il a une histoire, des combats, des croyances et même encore un peu d'espoir.

Je ne sais pas s'il a de longues années devant lui, mais sa vie, il l'a vécue, d'une façon ou d'une autre. Militant de carrière, si j'ose dire.

Je me souviendrai de cette rencontre.