"Racontez votre plus lointain souvenir, celui qui vous paraît le plus ancien, qu'il soit bon ou mauvais."

C'est ce que me demande tirui et comme j'aime bien tirui, je vais essayer de lui répondre.

J'ai deux problèmes. D'une part j'ai assez peu de souvenirs de ma petite enfance. D'autre part j'ai un sens chronologique assez peu fonctionnel. Donc je ne garantis ni les détails, ni la date exacte.

A me gratter la tête je me rends d'ailleurs compte que ce qui me revient en mémoire, ce sont des sensations de mauvais souvenirs, comme si les milliers d'instants heureux qui les plus-que-compensent (ô largement plus) n'avaient pas tant laissé de traces.

Bref.

Un jour sur un trottoir, à côté de la voiture paternelle.

La Rochelle ? Bordeaux ?

J'ai la quasi certitude que c'était dans cette région mais je ne saurais pas dire pourquoi.

On embarque les uns, les autres, le chien (un terre-neuve, le genre de chiens qu'on ne peut pas oublier d'embarquer).

Je vois la voiture démarrer.

Sans moi.

Torrents de larmes, ça dure un temps infini (2 bonnes minutes probablement, le temps que papa se rende compte qu'il a laissé la prunelle de ses yeux et fasse demi-tour en violant très certainement tous les articles du code de la route d'un seul coup).

Retour de la voiture. Sensation d'abandon jamais oubliée.

Je crois que papa s'en veut encore quand, occasionnellement, je raconte que je me souviens de ça.

Je ne sais pas si c'est vraiment mon plus ancien souvenir mais si après vous ne comprenez pas cet éperdu besoin qu'on me rassure, c'est vous que j'abandonne sur le bord de la route !

(Je fais le pitre mais c'est pour faire du bruit, pour être sûre que vous ne m'oublierez pas vous aussi sur le trottoir).

Barnabé, Fauvette (faut bien un baptême de questionnaire, aussi !), Fazou, Leeloolène, et ceux qui voudront, à vous de jouer si le coeur vous en dit...