Dans la voiture, j'ai plissé les yeux un peu, jusqu'à me réveiller assez pour poser les lunettes de soleil à l'endroit où elles remplissent le mieux leur office. Là, au bureau, la température est idéale, et la baie vitrée m'offre la caresse des rayons de soleil matinaux, juste assez pour avoir la sensation que c'est l'été, pas assez pour que ça en devienne inconfortable.

Trois cartons dans mon dos attendent que je les range.

Quelques mails, quelques rigolades, quelques pétouilles à dépétouiller avant de partir.

Je tape ce billet et les stores descendent. Du coup je peux à peu près déduire qui en détient la télécommande de l'étage. On pourrait regretter cette caresse solaire mais la sensation du soleil qui perce entre les lames des volets est tout à fait vacancière.

Je suis contente d'être en vacances ce soir, bien sûr. Mais ma vie de bureau a tellement changé ces derniers temps que je n'en suis pas soulagée comme les années précédentes. J'ai renoué ces derniers temps avec le plaisir d'aller travailler. Profitons-en tant que ça dure.

Ces dernières semaines ont été, qui plus est, un moment de fortes remises en causes, personnelles et de couple. Au bout de dix ans, nous avons grandi, évolué. Nous ne sommes plus tout à fait les mêmes que ceux de notre rencontre. Notre amour, non plus, n'est plus tout à fait le même. Forcément. Dix ans.

Alors que j'avais pensé que les longues et intenses discussions avaient permis à la fois de retrouver l'autre sous la couche de routine, d'habitudes et d'a priori, de commencer à solidifier les liens qui nous unissaient et qui étaient devenus un peu trop lâches, hier soir, rentrée plus tôt que prévu, j'ai eu un doute.

Mais les périodes de réflexions ont ceci qu'elles abîment facilement nos convictions, nos sentiments, par d'insinueux doutes. Alors quelle place lui faire, à celui-ci ? Ou placer le curseur de la confiance, quand on est sur un terrain qui a déjà été sensible ? Quel bout de soi abdiquer, celui qui se questionne trop ou son opposé qui fait trop facilement confiance ?

Et qui pourrait bien avoir une réponse définitive à ces questions. Au fond je l'ai, ma réponse : personne ne sait rien de façon définitive, en matière d'avenir et de sentiments.

Alors il serait mieux de faire la part belle à ce qui existe et qui est concret plutôt que de laisser les ombres ternir ce beau soleil d'été. Celui pour de vrai, l'autre aussi.

Je voudrais juste être suffisamment persuadée, depuis hier soir, qu'on est deux à voir les choses ainsi.

Je ne veux pas me battre contre des moulins à vents.

Je veux juste profiter du soleil dans le ciel et celui dans ma vie.