Ces derniers mois, il y avait une pensée en arrière-plan qui se précisait au fin fond de mon cerveau.

L'idée de victoire et d'échec dans la vie.

Il se trouve que la question a été abordée récemment plusieurs fois et que Flo m'encourage, alors je me lance pour une première salve, on verra bien ce qui en sort.

Il me semble que le monde entier raisonne en victoires et échecs. Familiaux, sentimentaux, professionnels. Or plus ça va, et moins je comprend ce que ça veut dire.

Comme si tout était un jeu avec un lot à gagner ?

J'ai pour ma part la faiblesse de penser que de toute façon, on "perd" à la fin. Et que de notre passage, il ne reste qu'à essayer d'être juste, selon nos valeurs, et de se donner des occasions de ne pas avoir à regretter d'être là.

Alors quoi ? Oui, on vit des choses. Des belles, des moins. Elles nous traversent comme on les traverse. On en ressort formidablement heureux ou complètement anéantis. Et il faut faire avec ça. Se regrouper et tendre vers ce dont on pense qu'il pourrait nous rendre heureux. A nouveau.

Professionnellement, j'étais choquée ces dernières années de voir comme les licenciements économiques étaient vécus comme des échecs personnels, des défaillances, par les salariés concernés. Mais rarement comme un constat d'échec de l'entreprise, qui, elle, n'avait pas su (toujours la faute au contexte, à la crise, aux actionnaires, que sais-je) faire autrement que d'utiliser sa variable d'ajustement.

En dehors d'un profond dégoût pour l'économie et l'entreprise quand elles nous montrent le pire, je me dis : pourquoi ces gens se sentent-ils tant en échec ? Pourquoi serait-il de leur seule responsabilité que de jouer leur rôle de maillon social qui produit de la richesse, pourquoi pensent-ils avoir failli alors qu'ils sont tout sauf coupables de quoi que ce soit ?

Dans la vie privée, c'est un peu la même. On a tendance à considérer comme un échec tout ce qui ne vient pas confirmer le joli petit tableau qu'on a en tête. Mais comment faire un tableau fixe avec des humains en mouvement constant ? Seul ou à plusieurs, nous interagissons avec le reste du monde, nous en faisons ce qu'on peut avec l'état dans lequel on est, mais aussi celui de nos plus proches.

Parfois ça fait un mal de chien, et on tend à s'accabler. Alors que bon. Une fois que la douleur est là, on serait sans doute plus inspirés de chercher comment l'apprivoiser, puis l'oublier et resplendir de nouveau (je sais, hôpital, charité, etc).

Et les victoires c'est pareil. Une victoire suppose qu'il y ait eu un perdant, en face.

C'est une idée qui m'est insupportable. Je préfère partager mes instants de bonheur, ou même les offrir, plutôt que d'infliger de la douleur à qui n'aurait rien demandé.

Alors voilà. On nait. On meurt. Et entre les deux on vit. Et mon chemin à moi, c'est de faire avec ce qui est, et être prête à accueillir tous les moments qui me font dire que "c'est beau, la vie, quand même" :D

C'est pas comme ça que tu vas devenir riche, a-t-on ri à ce genre de propos il y a quelques jours. Je sais. Non. Enfin si : riche d'autre chose. J'aime mieux.