MORALE ET VERITE - REBOND
Par Chiboum le vendredi 9 mai 2008, 08:00 - All about Chiboum - Lien permanent
Yves Duel, que j'aime bien lire notamment parce qu'il me donne l'impression d'être plus intelligente que je ne suis (qui plus est, un homme qui aime Bach et les "Histoires comme ça" ne peut être que fondamentalement fréquentable) écrivait l'autre jour en conclusion d'un billet cette phrase qui me donne du grain à moudre :
L'information, c'est un truc simple. Dans lequels interviennent, ce qui n'est pas courant dans l'univers du business, des critères de la morale. Par exemple dans le fait de chercher la vérité. Et aussi dans le fait s'assumer ses responsabilités.
Pour une qui, comme moi, à le sens du "moral" maladivement chevillé au corps, forcément, ça fait écho.
Et cette phrase qui devrait sembler une évidence pour les pourvoyeurs d'informations me laisse ébahie devant le fait que justement, ça n'en est pas une.
Ces derniers temps, entre la presse qui a viré sa cutie d'adoratrice présidentielle et brûle allègrement ce qu'elle a adoré, "l'affaire" Elkabbach (qui doit trouver que Sevran vaut bien une messe, hinhinhin), ou plus loin, les bourdes de Pujadas concernant la décision de Juppé de se retirer de la vie politique (temporairement, rappelez-vous, c'était hier), j'ai souvent le sentiment de me trouver au cœur d'une surenchère permanente de tout, sauf d'information.
Du détail qui tue, de la rapidité avec laquelle on me le délivre, du ton catastrophiste avec lequel on dit ou écrit la chose.
Mais de recherche de vérité ? Certes, la vérité en elle-même est un concept fluctuant, mais sa recherche, elle, est une noble quête. Dans ces informations pressées, on balance du scoop, de l'inédit, mais où est le temps de la réflexion, de l'investigation, de la mise en perspective ? Il faut aller vite, pour vendre plus, préserver l'audience, nourrir la ménagère ou le lecteur, mais à quel prix, pour la matière même de ce qui doit être annoncé ?
Les responsabilités ? Quand on dérape, c'est la faute aux autres, et il faut vraiment être pris la main dans le pot de confiture jusqu'au coude pour les prendre, ses responsabilités.
J'aimerais, quand je lis les journaux, quand j'écoute la radio, quand je regarde la télévision, ressentir un peu de cette "noblesse intellectuelle" qui fait que l'on se fasse un point d'honneur d'avoir étudié un peu son sujet, d'avoir cherché, démêlé, décodé, pour me donner une information à la fois compréhensible et étayée, argumentée, si je puis dire.
J'aimerais aussi que l'impunité des journalistes ne soit pas qu'affaire de protections, mais avant tout de professionnalisme.
J'aimerais que l'information ne soit ni show ni business, juste de l'information.
(On me souffle dans l'oreillette : tu rêves debout, ma vieille).
EDIT : Bon sang de bois, Pascal Sevran est re mort aujourd'hui, mais pour de vrai.
Commentaires
Il est sympa ton blog, on a des billets qui ne sont pas encore publiés :-x
Huhu, tu l'as eu en exclu, de retour vendredi, le billet, Raphaëlle !
Et bien en fait je ne l'avais pas lu ! Puisque j'ai tout de suite vu la date ;)
Je ne sais pas si tu as vu un documentaire assez intéressant sur la préparation du JT de 20h. Moi oui, et je dois bien dire que je ne le regarde plus depuis ....
Raphaëlle, héhé, tu te rationnes ?!! Non je n'ai pas vu ce documentaire, je ne suis pas sûre d'en avoir envie ! LOL
Ah mais Anne, :-x , tes critiques sont infondées :-x Tu devrais regarder le journal de JPPernault, en voilà de la vraie actu ! Avec de la morale, du beau, du vrai, de la culture des fraises et des boulangers qui nous font du bon pain de chez nous !
Je fais encore un peu confiance à la presse écrite et aussi à la radio ! je ne devrais peut-être pas ? La télé il y a longtemps que j'ai abandonné !
Valérie, ah c'est donc ça, il faut que je zappe !!
Madeleine, ben t'as qu'à voir Elkabbach :D
Il semble qu'il en est de l'information comme de tant d'autres choses : un bien de consommation périssable. D'où un manque de recul de plus en plus fréquent.
Logique, tourner 7 fois sans langue dans sa bouche (ou son stylo entre ses doigts) avant de la ramener, ça demande du temps, et du temps y'en a pas tant la trouille de se faire souffler l'info par les autres est plus forte : "pourvu que je sois le 1er, tant pis si c'est du n'importe quoi". :-/
Dommage pour ceux et celles qui prennent le temps de bien faire...
Hé j'écoute pas Europe 1 quand même ;-)
heidi, faut que j'arrête de penser "tourner 7 fois la langue dans la bouche des autres", je m'épuise moi même. Et voilà, du coup, ce matin j'étais la prems à parler de Sascal Pevran, pof !
Madeleine, ben tu vois ! Tu vas finir par avouer que tu ne lis que des blogs, pour t'informer !
Et oui, c'est justement parce que j'aime bien être informé que je ne regarde jamais les journaux télévisés, par exemple... Du coup je regarde la radio, mais les réglages sont pas faciles ;) Après, je me rabats sur écouter la presse... qui ne fait souvent qu'un bruit de papier journal...
"Bon sang de bois, Pascal Sevran est re mort aujourd'hui, mais pour de vrai." : j'avais vu apparaître l'info mais à force qu'ils fassent les idiots avec leur non-professionnalisme, j'ai cru que c'était une re-bêtise. C'est quand même terrible (je me mets à la place de ceux de ses proches qui ne le sont pas suffisamment pour être prévenus directement en premier mais assez pour être affectés par sa fin ; ce risque qu'ils ont de l'apprendre par une conversation captée entre deux quidams et qui s'esclafferaient sur le mode (très tentant pour qui n'est pas concerné) Ah ben tu sais pas la dernière, Sevran il est encore mort ! Voilà à quoi nous conduit l'info spectacle à la petite semaine.
Même conception que toi que j'ai. Il existe encore des journalistes qui tentent de la faire vivre. Fleurissement en ce printemps de magazines (hélas chers) avec des reportages longues durées, loin du sensationnalisme. Entendu parlé d'un supplément de l'Obs (rumeurs contradictoires quant à ses débuts) qui se revendiquerait de ce type de travail. (Auraient-ils à l'Obs qqch à se faire pardonner ;-) ;-) ?).
Comment peut-on rêver de qualité de l'information quand les médias sont controlés par des grands groupes financiers?
Oui, tu as raison. L'essentiel c'est de la chercher. Non pas d'enchoser les coléoptères sur le fait que "la vérité, ça existe pas" ; mais juste de chercher.
Avec bonne foi, pour le moins. Mais aussi avec les outils disponibles. Apprendre, etc.
Tien allez, je te fais cadeau de mon prochain aphorisme : la vérité, elle est beaucoup plus menacée par la paresse des journalistes que par les pressions des grands capitalistes qui possèdent les média.
K, même la presse papier a parfois quelques... faiblesses, on va dire...
Gilda, j'ai eu la même pensée que toi pour ses "proches pas si proches", il se sera un peu fait piquer ses dernières minutes de dignité, je le crains.
Quant à l'Obs, ce n'est pas ceux que j'aurais cité en premier au chapitre rigueur et bonne foi, va comprendre ! ^^
Moukmouk, le truc c'est que quand ils veulent résister, ils résistent. Ca dépend un peu de la motivation des rédactions, j'ai l'impression.
Yves Duel, celà dit les séances d'enchosage de coléoptères, accompagnées de breuvages plus ou moins alccolisées, peuvent avoir du charme ! Mais pas là, on est d'accord. Merci pour l'aphorisme, qui plussoie sur ma réponse à Moukmouk.
Le problème étant que la paresse de certains journalistes donne du pouvoir aux grands capitalistes, dans une certaine mesure.
Aaargh ! comme toi, j'ai de l'urticaire, chaque fois que je vois un journal télévisé. Je vomis tous ces pseudo journalistes et vrais "présentateurs" dont le niveau de vérité est indexé sur leur qualités d'access prime time ou le prix des pubs avant aprés. Ces reportages, ou l'homme de la rue est considéré comme un expert, ou la réaction épidermique fait office de reflexion de fond. Mais ce n'est pas tout, il y a aussi les magazines et les talk show politiques ou les invités tournent en boucle, tous d'accord en ce moment pour bouffer du Sarko, mais aucun pour être dans l'action, dans la réalité, dans la responsabilité de chaque citoyen. Comme toi, je les gerbe, d'autant qu'ils déversent leurbouillie frelatée sur le cerveau souple et candide de mes enfants. Je crois te l'avoir dit, je t'ai taggée, c'est ben sympa ici !
Bon, genre : on a la presse qu'on mérite. Peut-être ni toi ni moi, mais les gens. Qui ne se posent pas de questions, qui n'ont pas de doute, qui gobent tout parce que ça été dit à la télé...
Quand un journal est bon, c'est qu'il a de bons lecteurs, qui lui tiennent la dragée haute.
Ceci est à moduler avec une deuxième réalité : sur le plan économique, le marché des lecteurs n'est pas le plus important pour un journal, quel qu'il soit, ainsi la vente d'un numéro couvre à peine les frais de papier. Et ce n'est pas la redevance qui paie les coût faramineux d'un journal télé. Le lecteur (téléspectateur) n'est important que comme cible des annonceurs du journal, pas comme acheteur dudit journal. Donc suivant la catégorie visée par les annonceurs, et suivant ce à quoi la part de cerveau disponible est destinée (à Coca Cola ou la Pléïade, ^par exemple), l'information sera plus ou moins suivant ton attente. Mais ne demande pas à un média tel france2 ou Tf1 de faire de l'info. (surtout quand on voit le temps consacré à chaque sujet, faut pas rêver non plus).
Ecoute la radio, c'est un pu moins pire. ;-)
Bon, ben maintenant tu le sais, je suis de retour et comme tu peux le voir en pleine forme (enfin presque) :-P
Si je puis me permettre un tout petit bémol au commentaire précédent, avec lequel je suis d'accord sur le fonds : l'hebdo "Le Canard Enchainé", qui ne vit que grace à ses ventes, sans pub aucune.
cadum63, merci, et dis moi, tu es en verve !
akynou, ravie de te retrouver, le plus en forme possible. La radio, oui, je l'écoute plus que je ne regarde les JT, mais je trouve que plus ça va, moins ça va.
Mum'Troll, le Canard est un hebdo, à ce titre, déjà, ils ont "plus le temps" de creuser les sujets et ça s'en ressent. Par ailleurs, ils sont vraiment uniques dans leur créneau et ça fait toute une différence.