Ma chère Junko me demande ce que, du haut de mon statut de jeune maman, je pense des châtiments corporels.

Sujet épineux s'il en est qui entre dans la catégorie du "avant j'avais des principes, maintenant j'ai des enfants".

Pour re situer le débat, j'ai souvenir d'une fessée et d'une gifle dans ma carrière d'enfant. La fessée complètement imméritée, la gifle partie toute seule sur un phénomène notoirement connu d'épuisement d'un parent par un adolescent pas forcément complètement en tort, mais bien agaçant.

Je m'en souviens sans doute parce que ça a été rare, et que je n'ai pas grandi dans un environnement violent, ni en gestes, ni en paroles.

Alors bien sûr, aujourd'hui, j'ai envie de tendre vers le zéro geste de trop.

D'abord parce que, vis-à-vis d'un enfant (mais aussi d'un adulte), taper, ça veut dire n'avoir pas trouvé les mots. Ce n'est pas ce que j'ai envie d'apprendre à ma fille, ce n'est pas non plus mon tempérament d'avoir la main leste. Ce n'est pas le mode de communication que je souhaite d'elle à moi, même exceptionnellement. Je n'ai pas non plus envie de perdre sa confiance, ou de fausser sa vision du monde sur un geste de ce genre.

Alors certes, parfois on a envie de balancer ses enfants par la fenêtre, parfois on est envahi par une colère ou une fatigue qui semble insurmontable. Et j'imagine très facilement que devant la énième crise de "je me hurle par terre en hurlant" (on est un peu en plein dedans, d'ailleurs, cette enfant fait montre d'un caractère certain, ces jours-ci. Il paraît que c'est signe de bonne santé, au demeurant...), il arrive qu'on dérape.

Tout est dans ce "il arrive". Si c'est deux fois dans une vie d'enfant, ça n'est pas bien, il faut tout remettre à plat ensuite, expliquer qu'on est pas infaillibles, donner à l'enfant le temps de reconstruire sa confiance, sans peur. Mais ça se gère.

Ce qui m'effraie par dessus tout, c'est que le "ça arrive" devient régulier, récurrent, mode de sanction immédiat.

Vous en voyez tous les jours, comme moi. Un gamin qui piaille dans une file de supermarché, dans la rue. Qui fait une bêtise, petit ou grosse. Et paf. La baffe, la fessée. Sans sommation. Combien dans la journée ? Sans parler de ceux pour qui ça ne se voit pas. Ca se passe une fois la porte refermée. Et ça n'en laisse pas moins des traces vivaces.

Ca me terrorise. Quels enfants fabrique-t-on, quels adultes deviendront-ils ? Et la frontière est très très mince entre le "ça arrive" et le "souvent".

Alors, après réflexion et exercices pratiques, j'essaie de faire en sorte que ma colère vis-à-vis des colères ou bêtises de ma fille ne prenne pas une proportion incompréhensible pour elle.

Autant je ne cède pas sur les chapitres essentiels, et elle commence à connaître la ritournelle du "je te laisse faire ta colère dans ta chambre, tu reviens me voir quand tu seras calmée", quitte à me blinder un peu (tout en gardant l'oreille attentive !) sur ses pleurs et ses tentatives de se faire vomir pour attirer ma pitié. Ca fonctionne, la plupart du temps, et permet à tout le monde de se calmer avant d'enchaîner sur une explication du pourquoi hurler ne sert à rien et apprendre à contrôler ses frustrations est important.

En espérant que jamais je ne passerai le cap où "c'est parti tout seul". Parce que ça serait pour moi un constat d'échec. Parce que je ne saurais plus regarder ma fille en face, ni moi, je pense, d'avoir prôné le dialogue sauf quand c'est trop dur pour moi.

Il me semble qu'autorité et violence, même occasionnelle ne sont pas synonymes du tout. La preuve, d'ailleurs, c'est que j'ai eu une éducation plutôt très autoritaire mais pas violente ! Et que ne pas considérer que la gifle ou la fessée sont inévitables ne sont pas une preuve de laxisme (bien que parfois, si, mais ça dépend des gens). On peut être ferme sur les prix sans lever la main, j'en ai la certitude.

La patience est, on ne le dira jamais assez, la plus grande vertu des parents.

(Je profite de cette requête pour embrasser très fort une de mes sorcières ordinaires à qui je pense tous les jours, ainsi qu'à ses princesses).